Le réseau routier et autoroutier français et anglais au 1er janvier 1999


Samuel Lefevre

Pour certains acteurs locaux du développement, une infrastructure de type autoroutier est synonyme de développement économique. On estime les créations d'emplois à 23 par million de francs investis (pendant la construction) et 4 par kilomètre (pour l'exploitation, y compris les activités de sous-traitance). Cet effet direct lié à la mise en service d'une autoroute n'est pas le seul. Les gains de temps sur les trajets sont loin d'être négligeables (vitesse moyenne supérieure, encombrement réduit). Les zones d'emplois sont élargies. Les entreprises accèdent à de nouveaux marchés mais sont confrontées à la concurrence. Un trafic induit apparaît, les mobilités s'accroissent, les individus accèdent à de nouveau lieux, hier trop éloignés pour une visite dans la journée. Le tourisme se développe.

Si pour certains acteurs locaux du développement l'autoroute est une aubaine, des voix s'élèvent contre le « tout routier ». Certains soulignent la nuisance et la dépendance que cela génère. Les conflits répétés qui se sont produits ces dernières années – les routiers français et danois en novembre 1996, les routiers espagnols au printemps 1997, les routiers français et italiens à l'automne 1997 – ont paralysé l'économie des pays. Cette succession de conflits sociaux a révélé le rôle croissant des transports dans l'économie et la société. Dans le drame du tunnel du Mont-Blanc, – rappelons que la route a fait 8 437 morts en 1998 – la logique de l'expansionnisme du transport routier est mise en accusation. 35 millions de tonnes de marchandises transitent chaque année entre l'Italie et la France, 10 seulement sont acheminés par voie ferrée. La rentabilité économique à tout prix est recherchée. « La route est sacrée et le lobby routier toujours aussi puissant en France » (Le Monde, 1er avril 1999, Contre le « tout-routier », éditorial). En Grande-Bretagne, la construction même de nouvelles autoroutières a été dans le Sud l'enjeu de conflits importants.

Dans la zone transmanche, le réseau routier est marqué par une concentration des axes autour de Paris et de Londres, par des liaisons rapides régionales et enfin par un développement des axes nord-sud. Depuis 1996, les réseaux routiers français et anglais ont évolué. Le maillage autoroutier n'est pas encore complet, le coût d'un kilomètre d'une telle infrastructure l'explique en partie.

Dans la partie anglaise de la zone transmanche, quelques travaux ont été réalisés, essentiellement de structuration comme la liaison entre Swindon et la M5 reliant Birmingham et Exeter, ou encore la mise en deux fois deux voies de portions sur le réseau des routes nationales. Dans le sud de l'Angleterre, aucun chantier réellement important n'a eu lieu. Seules des mises en deux fois deux voies ont été réalisées sur certaines portions du réseau routier secondaire.

Dans le nord et le nord-ouest de la France, deux grands chantiers sont en cours : l'autoroute des Estuaires entre Caen et Nantes, dont la principale caractéristique est la gratuité, et l'axe Calais-Bayonne, maillon français de l'axe Nord-Sud Atlantique, reliant les principaux ports des côtes ouest de l'Europe de la Scandinavie à la péninsule ibérique.

Concernant l'autoroute des Estuaires, les derniers travaux entre Caen et Rennes sont en cours, les quatre cinquièmes de cette infrastructure seront en service avant l'an 2000. Au printemps 1999, 55 km ont été ouverts à la circulation dans le département de la Manche entre Guilberville et Pont-Farcy, d'une part et d'autre part entre Avranches et Saint-Aubin-du-Cormier. La déviation de Villedieu-les-Poëles (14 km), dans le sud de la Manche, la portion entre Rennes et Thorigné-Fouillard (3,8 km) ainsi qu'un passage à Pont-Farcy dans la Manche restent à achever. On peut donc aller aujourd'hui de Calais, c'est-à-dire d'Amsterdam, jusqu'à Caen mais aussi de Rennes à Biarritz plus aisément et rapidement que ces dernières années. La totalité du trajet n'est pas encore à quatre voies.

Concernant l'axe Calais–Bayonne, en 1996, seules les sections entre Boulogne et Abbeville et entre Rouen et Le Mans étaient à réaliser. Aujourd'hui, l'A16 est complète entre Boulogne-sur-Mer et Amiens, une jonction avec l'A28 est réalisée à Abbeville. Les travaux, entrepris par la société Cofiroute, sont en cours entre Le Mans et Alençon dans la Sarthe. La déviation est de la capitale ornaise est déjà aux normes autoroutières. La SAPN, la Société des autoroutes Paris Normandie, s'est retirée de la concession. Cette dernière est en effet endettée et est donc dans l'impossibilité d'assurer le financement de l'infrastructure. Au début de l'année 1999, un appel d'offre européen a été lancé et pour intéresser des sociétés la concession a été modifiée. Cet axe est selon les élus locaux essentiel pour le développement de l'Orne, un des rares départements français à ne pas compter d'infrastructures autoroutières sur son territoire.

En Basse-Normandie la connexion de Cherbourg est assurée par une 2 fois 2 voies vers Caen, le contournement de Bayeux n'est pas encore achevée. Les liaisons vers l'A84 par l'ouest du département s'effectuent par une route nationale.

Sur le reste du réseau routier national, deux autoroutes ont été construites, l'A85, entre Angers et Tours avec la mise en service de la portion entre Angers et Bourgueuille, et l'A29, reliant le Pont de Normandie à l'A13. Le boulevard périphérique de l'agglomération caennaise est enfin bouclé – il aura fallu attendre 70 ans – et celui de Rennes est en cours.

Sur le réseau secondaire, des mises en deux fois deux voies ont été réalisées : dans les Pays de la Loire, Nantes - Cholet, Laval - Martigné-sur-Mayenne, en Bretagne, la déviation de Elven qui complète la nationale entre Vannes et Plöermel ou encore la liaison vers le port de Lorient. Un chantier, plus important, est en cours, celui de la mise en deux fois deux voies de la RN12 entre Verneuil et Rennes. Certaines portions sont achevées : les déviations de Saint-Denis-sur-Sarthon et d'Alençon, et les sections Le Mêle-sur-Sarthe - Mortagne-au-Perche et Alençon - Hauterive.

L'ensemble de ces travaux, en particulier les jonctions de l'autoroute des Estuaires ont donné plus de fluidité au trafic sur le territoire français et modifié les distances-temps entre plusieurs villes.

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