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Atlas Transmanche

Un trafic transmanche en constante évolution


Catherine Ploux-Le Roch

« L'effet Eurotunnel » n'est pas le seul à avoir modifié la structure du marché transmanche. La concurrence naturelle entre les compagnies, leurs stratégies commerciales, comme les problèmes de devises sont des facteurs à ne pas négliger.

La concurrence entre compagnies

La guerre tarifaire

Déclenchée en 1995, la guerre des prix que se sont livrée les compagnies a eu des effets très perturbants sur l'ensemble du trafic transmanche. Les traversées promotionnelles sont devenues la règle dans le détroit. Si les passagers y trouvaient leur compte, cette politique a été très préjudiciable aux bilans financiers des compagnies comme pour Eurotunnel.

Par ailleurs, cette stratégie a déstabilisé le trafic en Manche-Ouest, produisant un déplacement de la clientèle souhaitant profiter des tarifs vers le détroit. P&O en menant la même politique de bas-prix sur la partie ouest de la Manche a porté un sérieux coup à la Brittany Ferries peu préparée à cette attaque concurrentielle.

Une offre de services de plus en plus diversifiée

Pour capter plus de clientèle, les compagnies ont déployé tout leur savoir-faire. Pour accroître les recettes des ventes de produits hors taxes (duty free), P&O et Stena Line n'ont pas hésité à transformer leur bateau en véritables centres commerciaux. Les compagnies y trouvent toutes de nombreux intérêts, tirant en effet de substantiels bénéfices, alors qu'Eurotunnel ne peut offrir les mêmes services. La perspective du marché unique et la suppression du duty free en juin 1999 inquiètent donc vivement les opérateurs.

Les offres de services à bord se sont aussi multipliées. Les compagnies ont misé sur la restauration pour les traversées de courte durée. Pour les voyages plus longs, elles ont diversifié les activités (cinéma, accueil des enfants, piscine, discothèques...).

Cependant, des différences de législation pénalisent les compagnies françaises, d'une part dans le cadre de l'implantation de machines à sous – de plus en plus nombreuses sur certaines compagnies, elles seraient un moyen pour compenser la disparition du duty free – d'autre part dans la législation sociale. La législation britannique est moins protectrice en matière d'emploi, de licenciement. De plus, les charges salariales sont moindres. Malgré des mesures compensatoires de l'État français, les compagnies n'y trouvent pas toujours leur compte.

La question des devises

La fluctuation des monnaies française et britannique ont accentué la désorganisation du trafic transmanche. Entre 1992 et 1996, la livre sterling a perdu 20 % de sa valeur par rapport au franc. Sa remontée en 1997 à son niveau de 1992 laisse présager une reprise du trafic britannique et des gains financiers.

En effet, pour les Britanniques, la France était devenue moins attractive financièrement et les produits français plus chers. Ceci s'est traduit par une baisse de la fréquentation. Les compagnies françaises ont été doublement touchées, d'une part par une baisse du nombre de passages, surtout en Manche-Ouest – les Britanniques représentent 80 % de la clientèle sur certaines lignes – et d'autre part, par des résultats financiers décevants, car elles réalisent une partie de leurs bénéfices en livres. Lorsque le change est défavorable, elles perdent de l'argent.

À la recherche d'une diversification

Les stratégies des compagnies de ferries influent sur le trafic, mais aussi sur la bonne santé des ports d'accueil.

Des ports aux profils divers

Les ports transmanche ont chacun leurs spécificités. Le port du Havre reste une exception. En effet, le trafic ferry est mineur par rapport aux autres activités portuaires (7 % du total), son activité fret est à l'inverse capital. En revanche, pour Dieppe et Caen, le trafic passager transmanche est vital. Ils ne sont desservis que par une seule compagnie sur une seule ligne, d'où une grande fragilité : la moindre fluctuation monétaire et les changements de stratégie de la concurrence leur sont immédiatement préjudiciables.

L'ouverture du Tunnel sous la Manche a fragilisé les ports transmanche. Néanmoins, les difficultés sont moins importantes pour les ports multilignes ou multi destinations, même si la concurrence entre compagnies est toujours rude.

Une diversification des destinations et des prestations

Les ports de la Manche-Ouest (et quelques autres) offrent aussi des liaisons à destination de l'Irlande. Cette ouverture de lignes leur permet de se tourner vers une autre aire géographique, très éloignée de la concurrence du Tunnel sous la Manche.

Certaines compagnies se sont positionnées sur des marchés différents. La Brittany Ferries a ouvert une ligne vers Santander en Espagne au départ de Plymouth, Poole et Portsmouth.

Sous peine de fragilisation accrue, il est vraisemblable que d'autres compagnies s'ouvriront à d'autres destinations.

Pour diversifier leurs sources de revenu, elles se sont aussi tournées vers d'autres marchés en particulier vers les prestations touristiques (circuits, hébergement, voyages...). D'autres ont offert des prestations complémentaires pour concurrencer l'Eurostar.

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